Combien vaut la forêt d’Amazonie ? Quelle est la valeur marchande de l’incessant labeur de pollinisation accompli par les abeilles… ?
Rencontre/débat/projections proposée par l’Université du bien commun à Paris, initiée et animée par Indira Bonvini & Yovan Gilles (Comité de pilotage de l’UBC)
Extraits des documentaires de Muriel Barra sur les forêts et l’arrivée de la financiarisation de la nature (Lato Sensu pour Arte).
Interventions et échanges avec : Muriel Barra, réalisatrice Lato Sensu pour ARTE. Elle découvre la vidéo par la production d’une émission TV de sports extrêmes (« X-Fun », 1998) puis celle d’une web TV culturelle (« TV-UP », 2000). Consciente des enjeux environnementaux et sociaux de notre époque, elle décide en 2004 de mettre sa profession au service d’une évolution des mentalités pour une société plus juste et responsable. Elle crée alors Lato Sensu Productions avec l’objectif de produire des documentaires militants et engagés sur des thématiques sociales et environnementales.
Sandrine Feydel, journaliste à France Télévisions. Elle travaille pour les différentes éditions des journaux de France 2, France 3 et France Info. Elle est spécialiste des questions écologiques et a déjà réalisé plusieurs magazines et documentaires sur ces thèmes, comme « Nature, le nouvel eldorado de la finance » (90 min, Arte), « Océans de plastique » (52 min, France 3) ou « Colorado, les voleurs de fleuve ». Elle est l’une des auteurs du livre « Greenwashing, manuel pour dépolluer le débat public » qui est sorti en Mars 2023 aux Editions du Seuil, et a aussi écrit « Prédation » (Editions La Découverte).
Frédéric Hache – Après 12 ans à travailler sur les marchés financiers, il rejoint en 2011 l’ONG Finance Watch où il a travaillé sur la réglementation des marchés financiers post crises. En 2017 il a co-fondé le Green Finance Observatory qui analyse les solutions de marchés appliquées aux politiques environnementales. Il enseigne également à temps partiel la finance durable à Sciences Po.
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Combien vaut la forêt d’Amazonie ? Quelle est la valeur marchande de l’incessant labeur de pollinisation accompli par les abeilles… ? Des conservateurs de la nature et des économistes plaident pour donner une valeur aux services rendus par les écosystèmes : eau potable, air de bonne qualité, pollinisation, absorption du CO2 par les forêts et les océans, diversité génétique… -, partant du principe que des ressources gratuites et perçues comme renouvelables à l’infini seront mal protégées.
Si nous n’attribuons pas une valeur et ensuite un prix aux richesses naturelles et aux bénéfices que nous prodigue l’activité écosystémique, il nous sera difficile de les défendre, plaident certains. Cette démarche ne fait pourtant pas l’unanimité. En effet, réduire « les questions environnementales à des fonctions utiles uniquement à l’être humain, avec une vision très partielle, sans comprendre les interactions beaucoup plus larges » n’est pas viable, critique Aurore Lalucq, députée européenne et co-auteure du livre Faut-il donner un prix à la nature. Fixer un prix ou une valeur « * ne garantit pas que tout le monde prenne des décisions pour la protéger », reconnait Mary Ruckelshaus, auteure du Natural Capital Project de l’Université de Stanford, qui prône des régulations publiques en la matière.
Avec la raréfaction des ressources naturelles et la disparition désormais inévitable de certaines espèces, la loi de l’offre et de la demande s’applique désormais aux « richesses » naturelles*. Depuis déjà plusieurs décennies, les biens communs naturels mondiaux attisent toutes les convoitises et se voient attribuer un rôle de premier plan sur les marchés financiers grâce aussi aux dispositifs économiques règlementaires destinés à les protéger. De tels dispositifs sont sensés servir de bouclier à leur dégradation sans pour autant parvenir à endiguer les agressions répétées dont ils font l’objet.
« Financiariser la nature pour la sauver ? Un nombre croissants de pays sont actuellement en train de mettre en place une comptabilité durable valorisant en termes monétaires la biodiversité et de nouveaux marchés sur la nature où se négocient des certificats biodiversité. Quels sont les avantages et limites de ces outils d’un point de vue environnemental, social et économique, quel rôle peuvent-ils jouer dans la lutte contre la 6ème extinction de masse des espèces ? » s’interroge Frédéric Hache.
Ce phénomène de financiarisation s’amplifie paradoxalement alors même qu’émerge en même temps, au nom d’une vision holistique du vivant, la conception d’une nature comme sujet de droit et « bien sans maître » depuis ces deux dernières décennies.
Ainsi, des banques et des fonds d’investissements achètent d’immenses zones naturelles riches en espèces animales et végétales menacées. Monétarisées et financiarisées, ces réserves sont ensuite transformées en produits boursiers comme l’eau par exemple devenue une valeur boursière sur les marchés à rente à Chicago en décembre 2021 ; ou alors transformées en monnaie d’échange et de compensation afin que de gros pollueurs puissent s’acheter un droit de polluer.
Pratiques vertueuses ou dérives pernicieuses ?
Il est de plus en plus difficile de fermer les yeux sur les ambivalences de la notion de dette écologique qui est compatible avec le phénomène de monétisation de la nature. En conclusion serons-nous capables de concevoir la planète comme un milieu vital partagé dans le cadre duquel la nature ne peut être réduite à la somme des services utilitaires ou récréatifs qu’elle nous dispense ?
L’UNIVERSITÉ DU BIEN COMMUN À PARIS Identifier, faire connaître et reconnaître les biens communs comme des spécificités démocratiques, écologiques, économiques et juridiques.
Initiée en 2017 par Riccardo Petrella, Frédéric de Beauvoir et Cristina Bertelli – avec Yovan Gilles et la revue Les périphériques vous parlent -, rejoints par les membres fondateurs, l’Université du bien commun à Paris est dirigée par un comité de pilotage qui oriente et organise les activités.
Des intervenant.e.s, sympathisant.e.s et collaborateur.rice.s, un réseau de chercheur·e·s, spécialistes, juristes, praticiens de la biodiversité, des militant·e·s associatifs, des parlementaires et des collectifs de citoyens permettent d’affirmer son rôle d’Université, populaire et collégiale, de développer et de renouveler ses interventions, de suivre les évolutions concernant les biens communs en France et dans le monde.
🥗☕️🍻 La Buvette de l’Académie est ouverte du mercredi au samedi de 11h à minuit !
Au déjeuner, venez déguster des plats végétariens, de saison et ultra locaux cuisinés par Sumac & Romarin. Au goûter, des gâteaux et pâtisseries et en soirée des petits plats à partager. À toute heure, bières, vins, boissons chaudes et fraîches !