Par Mathilde Boucher
Feux en Californie, inondations en Belgique et en Allemagne, canicules répétitives, cet été, les pays développés, habituellement épargnés par les aléas climatiques ont été gravement touchés. Il n’en n’est pas moins des pays d’Afrique et d’Asie, mais remis dans le contexte climatique régional de la saison des moussons et des ouragans, le nombre de catastrophes a été globalement similaire à celui des années précédentes.
Ces intempéries récurrentes qui ont sévit partout dans le monde inquiètent de plus en plus. Depuis 1970, les catastrophes climatiques ont été multipliées par cinq faisant un peu plus de deux millions de morts et des dégâts matériels s’élevant à 3 640 milliards de dollars. Cependant, bien que constaté à travers différentes régions du monde, le changement climatique touche plus durement les pays en développement, aussi bien sur le plan écologique que sur le plan économique.
Une situation géographique qui handicape
Du fait de leur localisation, les pays en voie de développement sont les plus exposés aux différents effets du changement climatique : stress hydrique, vagues de chaleur et de sécheresses, pertes de rendements agricoles, dégradation des habitats naturels… nombreuses sont les conséquences de l’augmentation des températures. Selon l’Organisation mondiale de la santé, à partir de 2030, les changements climatiques devraient entraîner jusqu’à environ 250 000 décès supplémentaires par an, liés notamment à la malnutrition, au paludisme, à la diarrhée et au stress thermique.
Au-delà de l’impact sur la santé humaine, le niveau de vie des populations risque d’être grandement affecté. Nombreuses sont celles qui vivent grâce à l’agriculture ou aux activités comme la pêche. D’ici à 2030, l’effondrement des rendements agricoles notamment dû à une météo défavorable pourrait faire augmenter les prix des denrées en Afrique Subsaharienne de plus de 12% en moyenne, selon un rapport de la Banque Mondiale. Cette hausse de prix agirait comme un multiplicateur de pauvreté, plongeant des millions de personnes dans l’insécurité alimentaire.
Des pays peu producteurs de gaz à effets de serre
Pourtant, les pays en voie de développement n’ont pas la même contribution aux émissions de gaz à effet de serre – grandement responsables du réchauffement climatique – que les pays développés. De par leur niveau de consommation, les pays développés et les individus les plus riches contribuent de manière accrue à l’augmentation de la température. Les membres du Climate Vulnerable Forum (CVF), constitué d’une cinquantaine de pays touchés par les conséquences du réchauffement climatique dénoncent ce phénomène inégalitaire. « Nos pays ne sont responsables que de 5 % des émissions totales, mais constituent les premières victimes du réchauffement climatique », souligne Abdul Momen, ministre des affaires étrangères du Bangladesh, dont le pays est membre du CVF.
Il y a donc une double peine : ce sont ceux qui risquent de subir le plus les conséquences du changement climatique qui contribuent le moins au problème.
La priorité est donc de comprendre dans quelles conditions les politiques climatiques peuvent être conciliées avec l’atteinte d’objectifs de développement, de réduction de la pauvreté et des inégalités. Stéphane Hallegatte, économiste à la Banque Mondiale le confirme : « La lutte contre la pauvreté est indissociable de la lutte contre le changement climatique. Il sera bien plus facile d’atteindre ces deux objectifs de façon conjointe ».
Des solutions envisagées mais peu effectives
Lors de la cop15 à Copenhague les pays développés s’étaient engagés à verser 100 milliards de dollars par an pour aider les pays en développement à atténuer et s’adapter au changement climatique. Mais cet objectif lancé en 2009 et réaffirmé en 2015 n’est toujours pas atteint. Cette année encore, les représentants du CVF réclament l’aide des pays développés en prônant l’adoption d’un “pacte climatique d’urgence”. Car si ces pays sont parmi les plus vulnérables, leurs objectifs, eux, sont parmi les plus ambitieux. « Les enjeux, tout le monde les connaît. Ce qu’il faut, c’est davantage d’attentions politiques à nos réalités, nos terres qui se salinisent, nos populations qui perdent leur toit ou leur mode de vie », déplore Abdul Momen.
Pour l’heure à Glasgow, les pays pollueurs n’ont pas relevé significativement leurs efforts financiers à court terme qui sont pourtant essentiels au recul des risques qui menaçent les pays en développement. “Nous savons que la poursuite des 1.5 degrés pour laquelle nous nous battons est le meilleur moyen pour non seulement protéger nos peuples et nos climats, mais aussi pour permettre à nos économies de croître », a assené le sénateur philippin Loren Legarda. L’heure n’est donc plus à la prise de conscience mais bien à l’action, un manque d’engagement et de financement pourrait engendrer des pertes irréversibles.